L'auteur, un homme de 65 ans habitant le centre-ville de Mâcon, a été présenté au tribunal ce vendredi. Récit de l'audience.
Ce 11 novembre restera dans les mémoires de la police nationale de Mâcon. Appelés au petit matin par une habitante de la rue Sigorgne qui venait d'entendre une voisine crier, trois policiers se présentent au pied de l'immeuble. Une femme est à la fenêtre et prétend que tout va bien. Elle a pourtant une tâche de sang sur son sweat... Les policiers décident de monter.
Madame répète que rien ne s'est passé mais son conjoint avoue qu'il l'a frappée. Les policiers constatent une trace de sang sur le sol. Ils décident d'embarquer le monsieur, qui s'énerve, refusant d'être emmené au commissariat. Il s'empare alors d'un couteau de cuisine de 35 cm et le pointe vers les policiers. Ceux-ci dégainent leurs armes et le somment de poser son couteau. « Tirez-moi dessus ! » lance-t'il... Puis il finit par se calmer et reposer le couteau. Les policiers rengainent et l'embarquent, menotté.
Placé en garde à vue et présenté au parquet, il est incarcéré pendant 24h et présenté au tribunal ce vendredi 13 novembre pour être jugé dans le cadre d'une comparution immédiate.
Ahmed a 65 ans, il est retraité, vit avec 1 400€ par mois, sa compagne est sans ressource. Ils sont en couple depuis 6 ans.
Ce matin du 11 novembre, ils venaient de boire du rosé et commençaient à s'engueuler pour le programme télé. « Elle commençait à m'insulter comme elle fait tout le temps. Moi je ne sais pas répondre verbalement. Ma main est partie, elle a pris un revers, elle est tombée et s'est blessée au visage. »
Madame n'est pas dans la salle d'audience, elle n'a pas porté plainte – « la banalisation de la violence » définira le procureur au cours de ses réquisitions.
À 8h20, elle présentait une alcoolémie forte de 2g40. Lui, qui dit l'accompagner dans ses beuveries, était à 1g30. « Elle boit depuis qu'on nous a retiré la garde de notre enfant. Moi, je la suis. » Leur enfant est un petit bonhomme de 3 ans placé en famille d'accueil. Tout est dit... Non, pas tout à fait... Ils ont trois enfants chacun d'une précédente union. Il ajoute : « Quand on s'est rencontré, elle sortait de prison. Elle a fait une cure de désintoxication. »
Ahmed le dit au tribunal : « Y a rien qui me retient ». Comprenez qu'il voudrait bien en finir avec la vie, en tout cas ce matin-là. « Il n'avait pas l'intention de frapper les policiers avec son couteau » plaide son avocat Maître Michel. « C'était une façon de leur faire comprendre qu'ils pouvaient l'abattre. »
Ce matin du 11, Madame est conduite à l'hôpital. Un médecin lui signe un certificat avec 5 jours d'ITT. Elle présente une tuméfaction au front, une plaie à la lèvre inférieure et des griffures au coup.
Pour ce qui concerne le prévenu, c'est la 3ème fois qu'il comparait devant le tribunal pour violence sur conjointe.
Les policiers quant à eux, se sont constitués partie civile. Maître Labaune, qui les représente, rapporte de leur part une peur rarement éprouvée en intervention alors qu'ils sont expérimentés. Il faut dire que l'appartement dans lequel ils interviennent ce matin est relativement petit, une trentaine de mètres carrés. C'est un peu comme si ils se retrouvaient nez à nez avec un homme les menaçant avec un couteau de cuisine, qui plus est un homme alcoolisé et dans une situation de stress intense.
« C'est pas passé loin » a confié l'un d'entre eux à l'avocate, qui demande réparation pour « préjudice moral pur et simple ». Les policiers n'ont en effet pas été blessés.
Après délibération, le tribunal l'a déclaré coupable et l'a condamné à 12 mois de prison dont 9 mois avec sursis probatoire. Il devra faire 6 mois compte tenu de la révocation d'un précédent sursis datant d'une condamnation du 16 décembre 2019 pour des faits de violence datant du 08 octobre 2019.
Il est maintenu en détention.
Il devra également s'acquitter de 600€ de préjudice à chacun des policiers intervenus ce 11 au matin. Il a évidemment interdiction de détenir une arme pendant 5 ans, obligation de se soigner et interdiction formelle d'entrer en contact avec Madame. La relation toxique est définitivement terminée.
Rodolphe Bretin