S'ils saluent les applaudissements du 20h de la 1ère vague de covid, remerciant la population d'avoir ainsi contribué au déclenchement du Ségur de la santé, les délégués CGT du personnel n'en sont pas pour autant dupes des promesses politiques qui ne sont pas tenues selon eux. Ils l'ont dit ce vendredi de décembre au cours d'un point presse.
« Le Ségur, c'est une revalorisation salariale de 180€ par mois. C'est bien, c'est important, mais on est bien loin de ce qu'il faut faire pour reconnaître réellement notre travail et redonner de la valeur, de l'attractivité à notre notre métier, mission de service public. » Et de rappeler que les personnels sont passés de service de 8h à 12h et ne seront pas payés en heures supplémentaires. « Dans la réalité, nous sommes même sur des service de 12h20-12h30, car une relève ne se fait pas en cinq minutes. »
La élu(e)s CGT sont donc opposé(e)s à ce principe, « mauvais pour la santé, qui augmente le risque d'erreur et occasionne de la fatigue psychique. Sans parler de la perte d'emploi qu'ils induisent. Ils représentent 2 postes perdus par service.
L'idéal dans un service, de nuit, serait d'avoir 2 infirmières. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. La nuit, il n'y a qu'une infirmière et une aides-soignantes pour 27 à 35 patients. La nuit, il y a du travail, des entrées, des anti-biotiques à donner, des perfusions à mettre en place. Sachez que les équipes de nuit sont épuisées. Ce passage en 12h est très difficile à vivre la nuit.
Enfin, c'est un frein à la mobilité entre les services, c'est dommage. »
Par ailleurs, la charge de travail n'a pas baissé depuis le dé-confinement affirment les soignant.e.s. La raison ? Les patients hospitalisés en conventionnel (non covid) sont très nombreux et dans des situations souvent très lourdes, car il y a eu les déprogrammations et la peur, pour beaucoup, de se rendre à l'hôpital. « Ils sont venus au dé-confinement et viennent maintenant. Ce qui fait qu'en effet, la charge de travail n'a pas baissé. »
Et de revenir sur la politique, notamment la loi de modernisation des services publics, qui entrera en vigueur en 2021. « Nous allons vers une individualisation totale de la gestion des carrières avec la fin des commissions paritaires. Il faudra que chacun se débrouille. Les syndicats n'auront plus de visibilité et ne seront plus en mesure de défendre les agents. Cela veut dire moins de promotion et plus de personnel contractuel, des gens qu'on embauche en catégorie C sans avancement possible. Nous avons demandé par exemple le passage des assistantes médico-administratives de la catégorie C à la catégorie B. Ce passage est repoussé à 2021. Sachez également qu'il n'y a pas eu de nomination depuis 2015. Tout cela pour faire des économies alors qu'on demande des bras depuis 2016 ! »
L'on se souviendra aussi de la mobilisation historique des personnels du service des urgences à l'été 2019. Ils avaient tiré la sonnette d'alarme comme jamais auparavant. Pour la CGT, la situation n'a pas changé.
Les représentants syndicaux ont évoqué également la situation des élèves infirmiers réquisitionnés. « Ils ont travaillé sur leur temps de formation, certains ont été malades et ont épuisé leurs jours d'arrêts maladie. Que va-t'il en être pour eux ? Nous serons évidemment avec eux pour les défendre.
Et la cagnotte pour le bien-être des soignants ?... La 1ère vague avait été l'occasion d'une cagnotte ouverte par la direction que pouvait abonder la population. Un don important a été fait par Antoine Griezmann. Hélas, de ce côté-là non plus, la satisfaction n'est pas au rendez-vous. « La direction nous a consulté pour savoir ce que nous souhaiterions pour améliorer notre bien-être au travail. Nous avons fait des propositions comme une salle de sport et des fauteuils de repos dans chaque service. Pour l'instant, rien ! On ne sait pas combien il y a eu dans cette cagnotte et nous avons peu d'espoir d'avoir été entendus. »
Quant à l'enveloppe de 31 millions promise par la Région, « ok, mais pour quels projets, pour quels établissements. Pour l'heure, nous ne savons rien. »
Bref, la crise, qui aurait dû être la grande occasion d'améliorer les conditions de travail des soignants.es et, de facto, la qualité du service rendu, n'a pour l'instant apporté que doutes et déceptions. « On n'achète pas tout » a conclu Michèle De Joseffo, faisant référence à la revalorisation salariale. « Nous avons besoin de personnel formé, d'une vraie considération qui passerait par la titularisation des contractuels, de la promotion professionnelle, des horaires décents et un vrai dialogue social. On nous reçoit, on nous écoute, mais on ne tient pas compte de ce que l'on dit. »
Rodolphe Bretin
Photo : Eve Comtet-Sorabella, infirmière, Eddy Tranchand, ASH, et Michèle De Joseffo, aide-soignante. Tous les trois sont représentants CGT du personnel.