L'entreprise à mission, ou comment l'entreprise permet d'accompagner les transformations de notre société. Séverine Lasserre, gérante, vient de refondre ses statuts pour faire d'Ecogit'Actions une entreprise de ce nouveau genre. Elle l'explique en détails.
Qu’est-ce qui relie Botanic, Danone, la MAIF ? Ce sont des sociétés à mission. Elles déclarent dans leurs statuts une contribution au bien commun, déclinée en objectifs sociaux et environnementaux, désignée par « Raison d’être ». A peine 260 entreprises, de toute taille, domaine ou structure, sont référencées par l’Observatoire des Sociétés à mission.
C’est la loi Pacte, relative à la croissance et la transformation des entreprises, qui introduit en mai 2019, la qualité de société à mission. Elle vient compléter le cadre réglementaire français pour lequel l’entreprise est orientée vers une seule finalité : atteindre des objectifs économiques.
Quand avez-vous décidé de transformer les statuts
d’Ecogit’Actions pour devenir société à mission ?
Ecogit’Actions a été créé en 2009 afin de conseiller et de former Entreprises et Collectivités au Développement Durable, à la Responsabilité Sociétale de l’Entreprise (RSE) et d’accompagner l’innovation territoriale locale. Il s’appuie sur l’un des premiers tiers-lieux de Bourgogne Franche-Comté : hébergement touristique écolabellisé en 2012, espace de coworking rural ouvert en 2013 et animation d’évènements fédérateurs, comme le pique-nique Entre’preneurs (2018 à 2021). C’est une entreprise tournée vers l’expérimentation et les interactions humaines.
Lorsque la loi PACTE a été promulguée, je venais de coanimer une commission pour le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD) du Mâconnais sur les nouveaux modèles économiques. Cette notion de « raison d’être » a résonné en moi. C’était comme si les morceaux du puzzle - mon fonctionnement d’entreprise et mes offres - s’ajustaient. Fin 2019, pour nos 10 ans, tout était rédigé : notre « vision du monde », nos valeurs et notre mission.
Concrètement, qu’avez-vous fait ?
Depuis l’ouverture de nos espaces de coworking, nos ateliers d’intelligence collective, ouverts à tout entrepreneur, nous poussent à réfléchir et à nous réinventer ensemble. Cette définition de notre raison d’être, couplée à nos valeurs, s’est donc écrite avec les entrepreneurs présents, suite à des rencontres lors des séminaires ou avec les réseaux. Une autre réflexion indispensable est d’ailleurs d’identifier précisément nos parties-prenantes, pour les intégrer justement à cette raison d’être : l’équipe, les clients, la Banque, les fournisseurs, le territoire... Concrètement j’ai donc cogité et ai posé beaucoup de questions à mon entourage, puis assemblé les éléments avec méthode, avant de rencontrer une juriste qui s’est occupée du dépôt au Greffe du Tribunal de commerce.
Qu’est-ce que ça change pour vous ?
La raison d’être d’Ecogit’Actions c’est « une entreprise qui contribue, par ses pratiques et activités, à essaimer et donner envie de vivre et travailler autrement, dans une logique plus respectueuse de l’Homme et de la Planète. »
Avec la pandémie, elle a été à nouveau travaillée, les nouveaux statuts viennent d’être déposés. Ils intègrent également un article obligatoire sur le suivi de la mission et les indicateurs. En effet, il ne s’agit pas simplement d’une déclaration mais d’être en mesure du prouver que nos actions tendent vers cette raison d’être ! Nous serons audités dans 3 ans par un organisme indépendant qui pourra retirer cette qualité statutaire. Ce formalisme me rassure et canalise mon activité, très diversifiée. Il donne du sens également à des actions qui ne « margent » pas ou peu mais m’apportent beaucoup de satisfaction comme le pique-nique Entrepreneurs, l’accueil de stagiaires, certaines animations et le prêt de nos salles à des associations par exemple.
Qu’est-ce que ça vous apporte ?
La qualité de société à mission m’apporte une cohérence et une légitimité pour accompagner Entreprises et Territoires vers des pratiques innovantes et plus respectueuses, que ce soit la transition alimentaire ou la RSE. Cela renforce le « Pourquoi » je développe telle ou telle activité, tel ou tel partenariat. Je reste cependant consciente que ce n’est qu’un premier pas vers la transformation nécessaire de nos modèles économiques.
Quels conseils donneriez-vous au dirigeant qui souhaite se transformer en « société à mission » ?
Se réinventer n’est pas facile et peut être long. Je lui conseillerais de se donner du temps d’abord. De rassembler son histoire ensuite : d’où il vient, ce qu’il vend et à qui, ce qui lui donne de la joie dans son métier, pourquoi il est performant, et qu’est-ce qui le motive à se lever le matin... Puis je lui recommanderais de s’entourer et de se fixer un cadre de travail, d’assembler avec ses équipes ses documents marketing et ressentir si c’est cohérent par exemple. Il peut également initier la démarche avec ses pairs, dans le cadre de journées thématiques de club d’entreprises ou lors de nos midis « Marchons en RSE » où nous interrogeons notre raison d’être.
Et après ? Vous connaissant un peu, vous devez avoir d’autres projets ?
Merci, en effet. 2022 va être riche, sur deux nouveaux axes : En juillet 2020, nous avons créé avec 3 associés dont Jean-Pierre, un avocat lyonnais, et François, consultant domicilié dans l’espace de coworking, la SAS O-FORMEL, Organisme de FORmation des Elus Locaux et société à mission.
Nous venons d’obtenir l’agrément ministériel pour exercer. Sa raison d’être est inscrite en article 3 des statuts, extrait : « O-FORMEL a une vision des territoires parfaitement gérés où développement économique, progrès social et protection et mise en valeur de l'environnement pourront trouver un juste équilibre grâce à une bonne connaissance des mécanismes de la gestion publique, des enjeux environnementaux et des modes de concertation participatifs.
O-FORMEL a pour mission de transmettre des outils et des connaissances ainsi que d’accompagner les élus dans leurs choix, décisions et gestion locale, à travers des modules de formation ad’hoc. La raison d’être d’O-FORMEL est ainsi de contribuer, par la formation des élus locaux, à des territoires comprenant, interprétant et vivant le « Développement Durable » tel que défini dans la Charte de l’environnement. »
Nous reformulons également notre offre d’accueil et d’accompagnement et souhaitons travailler encore plus avec des partenaires qui ont des valeurs communes et les mettent en application. Par exemple, nous avons rencontré les fondateurs d’OMEVA, société de recrutement basée à Bussières et... entreprise à mission !
Ainsi en 2022, nous offrons l’abonnement à nos espaces et animations aux sociétés à mission et structures engagées dans la transformation socio-écologique. Notre ambition, ce serait de créer un « jardin de talents » en Bourgogne du Sud : mutualiser les services d’entreprises en transition.
Un apéro POTEs (Pionnier Ordinaire de la Transition Ecologique) à écogit'actions début septembre.
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