Eve Comtet-Sorabella, infirmière, représentante CGT du personnel, était à l’entrée du centre hospitalier pour la journée de mobilisation de ce jeudi 22 septembre. Elle est revenue sur les conditions de travail des personnels et a évoqué un mouvement de grande démission comme elle l’avait fait lors d’un interview relaté dans nos colonnes le 16 septembre dernier. Une quarantaine de personnes était présente à cette manifestation.

« Une intersyndicale adressait en mars une lettre ouverte au maire, au député, et au directeur de l'ARS pour faire usage de leur droit d'alerte quant à l'absentéisme qui impactait l'EHPAD de la Providence. Pas de réponse... » entamait la représentante syndicale.

2016, mobilisation syndicale pour les EHPAD ; 2019, grève historiques des personnels des services d'urgence ; 2020 et 2021, crise sanitaire accélérant l'effondrement de l'hôpital public. Après tout cela, pas de changement notable déplore-t-elle. « En EHPAD, pas d'adaptation au vieillissement des résidents. On continue avec des moyens constants à s'occuper de gens qui perdent pourtant en autonomie. Pas de grille d'évaluation des dépendants. L'ARS, qui décident des enveloppes financières accordées aux établissements à partir d'un état prévisionnel des recettes et des dépenses, peut encourager un établissement à payer un équipement ou du personnel supplémentaire sur ses fonds propres et lui reprocher un an après d'aggraver sa dette... On marche sur la tête. En ce moment, le gouvernement se focalise sur la retraite et l'énergie et se moque bien de la santé. Rien ne change malgré ce qui s'est passé depuis 2019. »

En EHPAD un manque de personnel qui perdure, la création du service ambulatoire est une réussite en soi mais a diminué le nombre de personnel dans les services d’hospitalisation.

Pour ce qui concerne les salaires des soignants et des conditions de travail, « l'augmentation du point d'indice de 3,75 % est bien dessous de ce que demande la CGT. La prime covid, avec des salaires si faibles, c'était bien la moindre des choses après ce que nous avons traversé et les 12 ans de gel de l'indice. Et c'est une prime, qui ne sera donc pas comptée dans le calcul de la retraite... Par ailleurs, il n'y pas de prise en compte de la pénibilité. »

Résultat : 10 % d'absentéisme en 2021 et une forte probabilité pour ce taux soit au-dessus de 10 en 2022. Rien n'est fait, selon l'infirmière syndicaliste, pour encourager les gens à travailler à l'hôpital. « Nous sommes dans un mouvement de grande démission » dit-elle avec beaucoup d'inquiétude. « Les demandes de renseignements pour se mettre en disponibilité sont de plus en plus nombreuses. »

Elle évoquait aussi la mise en place récente d'un logiciel de gestion des remplacements : Hublo. « Cela encourage les heures supplémentaires. La perversité de ce système vient du fait qu'il devient plus intéressant de travailler à 80 % et de compléter par des heures sup mieux rémunérées que d'être à temps plein. Où sont les valeurs dans tout cela, l'esprit du service public de santé ?! »

Autre sujet abordé au cours de la prise de parole d’ Eve Comtet-Sorabella, la régulation des urgences par l’appel téléphonique préalable au 15 entre 18h et 00h00.

« C'était incontournable ici. C'est bien pour maintenir le service en état de fonctionnement. Pour autant, cela pose des questions quant à la vocation des Urgences, normalement ouvert 24h sur 24 à tous sans condition. On évite ainsi toujours la question des moyens attribués la mission de l'hôpital ».

Le bilan des hospitalisations depuis la mise en place de cette régulation devrait être connu en octobre.

« Nous vivons le 3ème contre coup du covid » concluait-elle, « ce qui provoque ce que j'ai appelé tout à l'heure la grande démission. Jusqu'où irons-nous comme ça ?...»

Nous assistons à un véritable mépris des personnels hospitaliers, un manque criant de reconnaissance de la pénibilité du travail de soignants.

Pour continuer à alerter, la CGT appelle à une nouvelle journée de mobilisation le 29 septembre, rassemblement à 10h devant la préfecture.

L’infirmière reprécise que la CGT n'a pas signé le Ségur de la santé et qu'elle demande la réintégration des soignants.es suspendus.es.

 

Propos recueillis le 16 septembre et ce jeudi 22 septembre

R.B. & MsP